Avant de quitter Kandy, il nous reste à prendre un peu de hauteur. Dom s’offre un jour de repos en tant que chauffeur, et nous nous laissons guider par notre logeur. Nous découvrons la ville depuis le sommet de Bahirawakanda, une montagne dominée par un immense bouddha blanc qui nous réserve une belle surprise colorée. Nous rencontrons une gentille famille et un sculpteur sur bois au sens des affaires surdimensionnées. Et nous finissons la journée, à déambuler entre les grands arbres du Jardin botanique, balade prisée des Kandyens.
Prendre du recul pour apprécier Kandy
Tout là-haut, gagner en sérénité
Aujourd’hui, au sommet de la montagne Bahirawakanda, nous gagnons en sérénité. Nous regardons la ville s’agiter au pied d’un énorme Bouddha blanc. Tout en bas là-bas, le temple de la dent, blotti dans son écrin de verdure, résiste au flux dévorant de la circulation urbaine. Le temple semble presque paisible dans sa niche végétale, son toit d’or nous rappelle notre récent parcours.
Ici, il faut à la fois lever les yeux vers l’icône vénérée et baisser le regard vers la ville trépidante.
Hommages à une grand-mère
Par hasard nous suivons une famille, très recueillie, elle ne remarque, d’abord, pas notre présence. Nous la suivons, elle pénètre dans la cuisse du bouddha par une porte de bois. Nous entrons dans une grotte, sous l’immense bouddha blanc. L’intérieur est chamarré. Du sol au plafond, des peintures racontent la vie du bouddha. La famille est accueillie par un moine, elle s’assoit au sol dans une pièce à part, et entame des prières. Un jeune homme resté à l’extérieur nous dit qu’aujourd’hui, la famille organise au monastère la cérémonie annuelle du mataka dana pour la grand-mère décédée, il y a deux ans.
Tous les ans, à la date anniversaire de la mort d’un être cher, la famille se réunit au monastère pour perpétuer le « mataka dana ». Au nom du mort, elle apporte les offrandes votives aux moines.
Le jeune homme m’entraîne un peu plus loin, me fait passer l’impressionnant couloir des bouddhas assis, et après hochement de tête d’un haut dignitaire du monastère, il m’invite à pénétrer dans une salle lumineuse et à prendre des photos.
La famille est assise au sol, elle recueille l’enseignement d’une tablée de moines safran, dont certains méditent si profondément qu’un léger ronflement s’échappe du discours commémoratif.
Les routes scabreuses du passé
C’est le troisième voyage de Dom au Sri Lanka, le premier remontant à plus de … 40 ans (déjà!). Il gardait un souvenir ému des fabriques de batik et des sculpteurs sur bois.
Notre logeur nous déconseille d’aller dans une fabrique de batik, nous ne retrouverions pas la tradition telle que nous l’avons connue. Cette impression de dessins colorés sur tissu demande patience, temps et une technique que les jeunes ne veulent plus, d’après lui, apprendre. La plupart des batiks vendus aujourd’hui au Sri Lanka viendraient d’Indonésie, dont c’est le pays d’origine.
Dom se rabat donc sur la visite d’un sculpteur sur bois. Notre hôte nous emmène dans l’archétype du quartier « couleur locale » fait de maisonnettes de terre, de bois et de tôles entourées d’arbres nourriciers. Au bout d’une ruelle en terre battue, nous sommes accueillis, dans une maison très rustique par une petite famille adorable : Papa, maman la trentaine bien portée et deux fillettes. Avec force et détails, il nous montre la fabrication d’objets de bois grossiers et usuels avec des outils rudimentaires. Nous avons droit à un cours particulier, bien rôdé, sur les différentes essences et sur les masques traditionnels.
Tous les masquent ont une fonction précise. Ils préservent de tous les maux : du mauvais oeil, malheur, maladie, dangers de tout poil… Ils contribuent au bonheur de tous, apportant amitié, harmonie, paix, pouvoir et même popularité pour ceux qui font germer en eux, une graine de star.
Après ce cours magistral, il nous entraîne hors de son atelier à ciel ouvert dans une pièce, aussi grande que la maison. Nous y découvrons « les galeries La Fayette de la sculpture sur bois ». Des rangées d’étagères où les têtes bien alignées d’éléphants, de bouddhas assis, couchés se succèdent à l’infini. Et sur un petit bureau de bois, une machine à carte bancaire.
Serions-nous tombés dans un piège à touriste déguisé en authentique maison familiale ?
L’habit ne fait pas le sculpteur
Dès le départ, j’avais été surprise quant à la tenue vestimentaire très occidentalisée du « sculpteur ». Mais l’apparence ne devrait pas être un critère. Un malaise s’installe lorsqu’il nous affirme que toutes les productions sont les siennes. Je m’entends lui demander doucement : « Et depuis combien de générations? » Il balbutie quelques mots inaudibles. Il faudrait des dizaines de sculpteurs pour fabriquer autant d’articles aussi bien standardisés dans son atelier rudimentaire.
C’est de bonne guerre, le business touristique existe, impossible d’y échapper à tous les coups. Nous sourions d’un air entendu, un regard espiègle lancé à notre logeur qui disparaît dans son tuk tuk. Affaire classée!
Dans les jours qui suivent, alors que Dom aura repris son rôle de chauffeur, il s’arrêtera en bord de route, le long d’un atelier qui nous ouvrira grand ses portes. Il a enfin retrouvé l’air d’antan qu’il cherchait.
Le Jardin botanique royale de Peradeniya
L’histoire de ce jardin remonte au règne de Wickramabahu III en 1371. Il subit lui aussi le courant mouvementé de l’histoire du pays, et tout comme le Maligawa, aujourd’hui, il est l’un des symboles de la capacité de résilience du pays tout entier.
Loin d’un centre touristique réservé aux étrangers, c’est avant tout la promenade préférée des Kandyen et plus largement des Srilankais. Le jardin affiche 1,2 million de visiteurs locaux par an. C’est donc l’occasion de saisir des scènes touchantes de promenades et de pique-nique en famille à l’ombre des grands arbres. Et peut-être, d’assister aux prémices d’une idylle bucolique?
Le jardin longe la « Mahaweli River », la plus longue rivière de l’île. Il compte plus de 4000 espèces végétales réparties sur plus de 59 hectares. Nous y retrouvons même, une vieille connaissance : le coco-fesse des Seychelles.
Dans les allées, nous croisons des écoles de novices, menés par des moines. Nous faisons connaissance avec le responsable du « porte-monnaie », il se présente comme tel, avec sa chemise à fleurs et son beau sourire. Un joli moment partagé.
Nous nous émerveillons aussi sous les arbres à chauve-souris. Aussi nombreuses que les boules du sapin de Noël Rockefeller à New York, ces volatiles s’agrippent aux branches des plus hauts arbres du jardin. Au dernier recensement, elles seraient 24000 dans le jardin de Peradeniya.
Partout, nous déambulons au milieu de familles de singes. Ils mangent, se gratouillent, s’épouillent, se disputent, s’endorment, ou fabriquent les générations futures ignorant leurs cousins humains.
waou magnifique reportage et quel travail de montage des photos et vidéos
Je suis très impressionnée BRAVO
Merci c’est très gentil
Magnifique reportage, comme d’habitude, ma chère Nat… Je suis plus qu’honorée d’en avoir la primeur, je n’ai pas pu le lire tout de suite car j’avais du monde à la casa…
J’ai adoré le grand bouddha blanc, nous y sommes allés en tuc-tuc, inoubliable !! Et on est aussi rentrés à l’intérieur par la cuisse du bouddha
Le jardin botanique est une pure splendeur, on y est restés plusieurs heures, tout est superbe.
Merci encore, c’est passionnant ! De gros bisous ❤️❤️❤️
merci à toi, de ton message, c’est tellement encourageant, je pense pouvoir boucler l’ensemble des récits vers fin avril, ou début mai… j’avance lentement, dans les méandres des siècles, la recherche demande des heures de passion et je suis heureuse que le résultat soit reçu avec autant d’enthousiasme
Merci Nat pour ce petit moment d’évasion bravo très beau travail tes magnifiques photos sont merveilleusement décrites..❤ ainsi que ta petite vidéo..tes récits pour moi c’est un vrai rayon de soleil ils me transporte et ça fait du bien au moral ça change du quotidien et surtout enlève tous le stress de la semaine MERCI ❤ et encore une fois BRAVO..
Merci de ta fidèle lecture
Ce peuple porté par leurs croyances est émouvant le grand bouddha est impressionnant. Le business touristique gâche souvent ce que nous avons pu connaitre à une certaine époque, content que Dom est pu être consolé par la suite. Le jardin est somptueux de quoi faire rêver ma petite page « Évasion dans les jardins etc. » Ho notre copain le coco-fesse ! Merci Nat pour ce moment de sérénité, ton récit si bien écrit ! tes photos, vidéos, montages sont magnifiques ! Quel talent ! Bravos…
Merci à toi Dany, je suis heureuse de t’avoir emmené vers ce jardin qui tu aimeras à coup sûr !
Ce nouveau chapitre m’a beaucoup plu. Déjà l’hommage à la grand-mère m’a touchée…nous devrions en faire autant! J’ai presque eu l’impression d’entrer aussi dans le grand Bouddha Blanc… une ambiance solennelle que la vidéo nous fait vivre.
La visite chez le sculpteur sur bois m’a amusée … j’imagine la déception de Dom et aussi l’embarras du vendeur se sentant démasqué tel un enfant tricheur!
En tout cas, ce jardin extraordinaire vous aura fait oublier cet épisode cocasse! Merci Nat pour cette multitude de photos toutes plus belles les unes que les autres…un lieu magique, hors du temps, où l’on doit se sentir tellement bien! Mais peut-être y retournerez-vous encore… la sérénité est au rendez-vous !
Bravo pour ce récit tellement vivant et l’éblouissante mise en page. Finalement, nous aurons tous découvert le Sri Lanka grâce à un guide d’exception !
Merci Sylvie de ton message. Si nous devions y retourner cela ferait le 4e voyage pour dom en 40 ans 😉 ….
Mais à chaque voyage, nous sommes heureux de retrouver l’ambiance, car si le pays est bien ancré dans la modernité, il a su garder ce qu’il fallait de sa tradition
Et pour le sculpteur, je trouve que c’est de « bonne guerre », nous ne lui en voulions pas d’essayer 😉