Dans ce blog : Un dernier passage vers La Table… pour le petit déjeuner avant de prendre la route et de partir dans « l’arrière pays » du Cap, rejoindre les vignobles tri-centenaires de Franschhoek, le coin des Français, au coeur des monts du Drakenstein.
Bonjour,
Depuis que nous sommes arrivés en Afrique du Sud, nous devons faire l’effort de nous rappeler que nous sommes sur ce continent ! Incroyable comme la région du Cap se différencie de tout ce que nous avons vécu ailleurs, et notamment en Namibie! Aujourd’hui, en nous éloignant du Cap pour rejoindre ce qui se nomme en afrikaans « le coin des Français » nous devons nous pincer pour ne pas nous sentir en Europe !

En quittant la « Grosse ville du Cap », rapidement nous traversons les contre-forts du Drakenstein (littéralement Roche du Dragon), véritable forteresse qui défend « la campagne » viticole sud-africaine. Nous pénétrons dans un hémicycle montagneux, dont 70 000 hectares sont consacrés à la réserve naturelle du Hottentots-Holland. Ce massif fait partie de l’énorme bouclier qui englobe toute l’Afrique australe et que l’on nomme « le grand escarpement » . Je vous en parlais déjà lors des différents blogs consacrés à la géologie de la Namibie.

Au fond de ce cirque naturel s’étale le village de Franschhoek qui se finit en apothéose sur les flancs de la réserve du Mont Rochelle. Soignée et mignonne, cette petite ville de province, est entourée de très riches propriétés viticoles. Les ruelles sont calmes, tellement propres, on mangerait sur le bitume ! Les maisons impeccables sont serties de jardins où pas une herbe ne s’échappe du gazon. Les jardins dominés par les jacarandas en fleurs se dessinent sur fond de massifs montagneux majestueux. Le cadre est magnifique.

Néanmoins, l’atmosphère semble « formolisée » , artificielle. Dans mon carnet de voyage, je note : « nous sommes au coeur de la Jet7 Winery ».

La vallée fut surnommée par les premiers explorateurs : Olifantshoek, le coin des éléphants. Ainsi, lorsqu’en 1687, les cavaliers pionniers commandés par Simon Van der Stel pénètrent dans la vallée, celle-ci est riche d’une flore endémique qui abrite des troupeaux d’éléphants, mais également lions, léopards…
Quelques mois plus tard, la Compagnie néerlandaise des Indes orientales affrète un navire transportant des réfugiés huguenots d’origine française afin qu’ils rallient Le Cap. Ces Huguenots s’étaient retrouvés en Hollande à la suite de la révocation de l’édit de Nantes par Louis XIV en 1685. La compagnie leur offrait un pécule et une terre à cultiver en Afrique du Sud pour une durée de 5 ans minimum. Cent soixante seize Huguenots débarquèrent au Cap au cours du premier trimestre 1688. Plus tard, ceux-ci furent rejoints par une centaine de candidats à l’aventure.

Sur place, le gouverneur Van der Stel leur proposa un deal : « vous aurez des terres à conditions que vous chassiez les éléphants de la vallée. » Les Français firent preuve de ténacité et de résistance. Ils emmenaient avec eux leur savoir-faire et des pieds de vignes. Ils trouvent dans la vallée de Franschhoek, « nettoyée par leurs soins » un terrain propice à la viticulture. C’est ainsi que depuis trois siècles cette activité fait la richesse de la région. Dans le musée des Huguenots, du centre ville, l’exemple parmi d’autres de Pierre Joubert, témoigne de l’ascension rapide des ces familles fraîchement débarquées. Arrivés comme ses comparses en 1688, les mains vides, dès 1700 il comptabilisait sur son domaine 16 000 pieds de vignes et 300 moutons.

L’humain y a trouvé un terrain idéal à son expansion. Quant à la faune et la flore originelle… les réserves naturelles tentent de sauver ce qu’il reste, c’est à dire 7 malheureux léopards qui rôdent encore dans les parages… En cela, les Européens firent exactement en Afrique ce qu’ils avaient depuis longtemps fait sur leur continent : « prendre toute la place » !

Aujourd’hui ce qui nous frappe lorsque nous nous baladons dans Franschhoek, ce sont les écriteaux, devantures de magasins, restaurants… tout, ou presque semble écrit en français. Mais parle-t-on français pour autant ?
Que Nenni !
Les raisons en sont simples : » les réfugiés huguenots étaient presque tous illettrés, ils avaient du mal à s’organiser en tant que communauté, un tiers d’entre eux venaient de Provence, un tiers des Flandres, ils parlaient la langue de leur région. Sans compter que beaucoup avaient déjà passé pas mal de temps en Hollande avant d’embarquer et maîtrisaient le Hollandais ». (Juna Malherbe, historienne et généalogiste au Musée des huguenots répondant au Monde) . « Trente ans après l’arrivée des premiers colons, vingt-cinq personnes seulement parlaient encore leur langue maternelle. Une génération plus tard, il n’y avait plus un francophone dans la colonie. Les huguenots faisaient dès lors partie de la communauté qui plus tard allait s’appeler les Afrikaners; leur langue était l’Afrikaans, un dialecte proche du néerlandais du XVIIe siècle mâtiné de quelques influences indiennes et zoulous. »

Alors, pourquoi francise-t-on à outrance ce village ? La franco-mania qui sévit dans les parages depuis quelques années, a même réveillé ses vieux démons, et fête de manière bien particulière un 14 juillet, qui se nomme… « Bastille Day ». « Les commerçants, les chefs cuisiniers, les hôtesses du tourisme portent tous un béret rouge dans des rues pavoisées le temps d’un week-end de drapeaux « rouge, blanc, bleu » (les habitants de Franschhoek pour une raison mystérieuse annoncent toujours les couleurs françaises à l’envers ». Quoique, nous avons failli rejoindre cette tradition, un certain 14 juillet 2018 sur les champs Elysée au passage de la Patrouille de France (!) L’emblème de la municipalité est le drapeau bleu, blanc rouge, orné en son centre d’un éléphant qui rappelle qu’avant d’être Franschhoek, la vallée, régulièrement traversée par des pachydermes, était appelée Olifanthoek. »
La « french touch » ouvre ici les voies impénétrables du Dieu Commerce ! « Il peut y avoir jusqu’à 50 000 visiteurs pendant les « Bastille days », qui permettent à la ville un regain d’activité au beau milieu de l’hiver austral. Pendant deux jours, on joue aux boules, on regarde des films français sous-titrés, mais surtout on déguste du vin et du fromage. Les restaurants de la ville sont pleins. Franschhoek a en effet acquis la réputation de la ville la plus gastronome du pays. »

Le soir venu, nous avons dîné au retaurant la « French connection », j’ai testé quelques mots de français, mais la serveuse fut, quelque peu sourde à mes tentatives… Si ce nom de restaurant est facile à prononcer par les habitants, les entendre prononcer les noms des autres restaurants tels que « la Bouillabaisse », « Au bon vivant », « Quartier français », est une expérience linguistique inoubliable.
Laissons-là les mondanités franco-africaines, les cours de prononciation sont un combat inutile. En revanche, la région offre un tout autre attrait : la randonnée sur les sommets qui dominent le village. Et pour ce faire, depuis la pension de famille « La Fontaine », nous suivons les chemins de Dieu Donné et de Chamonix, cela ne s’invente pas !
Place au voyage en images
Le voyage en vidéo
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A très bientôt pour la suite du voyage, et notre étape à Hermanus !
Escale précédente : Découverte de La Table et randonnée au Rocher du Lion
Nat & Dom
Texte et photos Nathalie Cathala.
Auteurs des vidéos : Dominique et Nathalie Cathala
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Sources Bibliographiques
Franschhoek, le « coin des Français » en Afrique du Sud, Le Monde Voyage, par Fabienne Pompey
Suis tombée en amour pour la Namibie ! Les paysages d’Afrique du Sud sont magnifiques avec ses jacarandas en fleurs, mais je n’ai pas la même émotion ! Un très beau et riche carnet de voyage ! Merci Nati et Domi..
Ha … ben tout comme moi Dany, cela se ressent sans doute dans mes articles… Tout au long du voyage en Afrique du Sud j’étais tellement imprégnée de la Namibie, que j’ai vraiment dû oublier, pour savourer
Que ces arbres sont beaux, je suis soufflée par leurs couleurs ! Et j’ai tout spécialement goûté la leçon d’histoire du jour. Très instructive ! A priori le premier drapeau français était rouge blanc bleu, j’ai trouvé un peu d’histoire ici : https://www.nouvelobs.com/societe/20151129.OBS0347/10-choses-que-vous-ignorez-probablement-sur-le-drapeau-francais.html
J’ai ma petite idée quant à la francisation outrancière du lieu : le marketing (ne vend t’on pas du vin ?!) .
Je suis arrivée sur ce post grâce à la nouvelle carte interactive, en cliquant sur le numéro 4, abrité au cœur des montagnes.
Merci encore pour le voyage !!!
Merci Isabelle de ce commentaire, et oui.. tu as bien compris la francisation … et l’art de vendre du vin 😉
à bientôt pour d’autres aventures