Au programme : Nous quittons l’océan pour rejoindre notre « cher désert »! Nous pénétrons dans le « Damaraland », la Terre ancestrale des Damaras qui connurent un passé mouvementé. Nous espérons aussi voir ou approcher une faune prometteuse. Le Spitzkoppe, « montagne-île » est magnifique par ses volumes, ses cachettes où se nichent des peintures rupestres. Et que dire des couchers de soleil? … Une merveille à découvrir !
Bonjour ,
Nous quittons les rives océaniques par un matin brumeux et frais. Nous traversons Swakopmund, une ville balnéaire, dont l’architecture surfaite, et la vue de Himbas qui se prostituent en périphérie ne nous retiennent pas.

Bonheur de retrouver les pistes solitaires et de découvrir au bout notre prochaine escale : le Spitzkoppe, inselberg plantée sur une hamada. A gauche le sommet ressemble pour les Namibiens au Mont alpin le Cervin
Très vite, nous regagnons les pistes solitaires et notre cher désert ensoleillé, ses vents chauds! Nous changeons une fois encore de décor. C’est fou ce que la Namibie est riche en paysages! En partant vers le Nord-Est nous pénétrons dans les terres ancestrales des Damaras. Leur horizon est fait de rivières asséchées ou éphémères, de grandes plaines de gravier (Hamadas) qu’agrémentent de nombreux massifs de granit qu’ici l’on nomme Inselberg. Ce terme venu de l’allemand désigne une « île montagne ». C’est tout à fait ça ! Nous roulons durant des kilomètres sur des hamadas d’altitudes variant entre 700 et 1000 mètres, puis soudain apparaît telle une île dans cette mer de gravier une montagne isolée.
L’aridité endémique n’a pas découragé une faune composite. Avant d’aborder la région, on nous laisse espérer que nous verrons : éléphants, girafes, autruches, zèbres, léopards, antilopes et même des rhinocéros noirs ! Nous sommes perplexes et nous nous demandons de quoi vivent ces gros mangeurs d’herbe. Pour les prédateurs, la question ne se pose pas… En réalité, il ne faut pas s’attendre à voir tout ce petit monde d’un coup, ou regroupé dans un coin accessible! Il nous faudra plus d’une semaine et des centaines de kilomètres pour voir ou approcher la plupart des animaux précités. Sauf, le rhinocéros noir, que nous verrons plus tard à Etosha.

Regardez bien cette photo. Vous y verrez le « garde-manger » d’un léopard. Il a monté sa proie en haut de l’arbre. Cet arbre non loin de notre bivouac, nous laisse présager de sa présence…
Mais j’anticipe et je vous parle déjà des escales à venir… Pour l’heure, nous entrons en contact avec la population et découvrons les magnifiques panoramas du Spitzkoppe.
Damaraland ou Erongo ?
En raison de ses chamboulements historiques et coloniaux, la Namibie se divise en régions administratives, mais aussi en « régions » culturelles et historiques. Ainsi, tant que nous sillonnerons la partie nord-ouest de la Namibie, nous ne saurons s’il faut dire que nous sommes dans le Damaraland, dans l’Erongo, voire le Kunene. Depuis l’Indépendance, le pays est divisé en régions administratives gérées par l’État. L’Erongo et la Kunene sont parmi les 14 régions administratives de la Namibie, tandis que le Damaraland était « le pays des Damara ».
Les ethnologues ne savent pas grand-chose du peuple Damara (on trouve aussi le nom de Bergdama, mais sur place les personnes se présentaient en tant que Damaras). Certains scientifiques supposent que les Damaras étaient parmi les premiers Bantous à s’installer en Namibie. Les Bantous sont issus d’Afrique centrale. Le terme « bantou » ne regroupe pas des peuples ayant des structures sociales et politiques identiques, mais les locuteurs d’une même famille linguistique. Entre 250 et 500 langues bantoues observent des dénominateurs communs, le nombre varie en fonction de la prise en compte ou non de nombreux dialectes. Mais, aucune de ces langues n’utilise les clics. Or les Damaras parlent comme les Namas avec des clics. Les Damaras en adoptant la langue des Namas ont brouillé les pistes qui menaient à leurs origines. D’autres ethnologues s’aventurent à ne trouver aucun point commun physique entre les Bantous et les Damaras, observant que ces derniers se rapprochent plus des peuples noirs d’Afrique de l’Ouest. L’énigme reste entière!

Nous rencontrons aux abords du bivouac, une petite famille qui vend quelques cristaux dont la région abonde (quartz, dioptaze, roses des sables…). Les enfants nous font la fête, et la petite ne me quitte plus…
À leur arrivée en Terres australes, les Damaras se partagèrent les régions avec les Sans. Il n’y a pas de données particulière concernant cette période. Plus tard, les Damaras furent pris en étau par une double vague migratoire. Celle des Namas venus du Sud et celle des Herero venus du Nord. Les nouveaux venus réduisirent les Damaras à l’esclavage. Certains échappèrent à ce sort funeste en fuyant vers les terres les plus hostiles que sont les hautes montagnes (Brandberg…). Là, ils menèrent une vie précaire de nomades, pratiquant la chasse et la cueillette, élevant quelques bêtes. Durant des décennies d’esclavage, les Hereros et les Namas exploitèrent les techniques de forge et de poterie que maîtrisaient les Damaras pour fabriquer bijoux, outils, ustensiles.
Bien qu’aujourd’hui les Damaras sont en majorité convertis au Christianisme, il reste des traces de leurs croyances ancestrales. Ils pratiquent le culte du feu sacré, qu’ils ne laissent jamais s’éteindre. Ils honorent aussi une divinité dispensatrice de pluie et de fécondité.
Après ce long épisode douloureux pour le peuple Damara, paradoxalement c’est l’arrivée des Allemands en tant que colons qui les affranchirent. Mais lorsque les Namas et les Hereros s’organisent contre l’envahisseur allemand, les Damaras s’unissent à leurs anciens « tyrans ». La répression sera très dure (mention est faite dans le Blog Aus-Lüderitz)

Répartition des « homelands » ou bantoustans lors de l’apartheid en Namibie
Les Damaras retrouveront leurs terres ancestrales sous l’apartheid, lorsque les Bantoustans ou Homelands sont créés par ce régime qui n’avait d’autre ambition que d’assurer un développement à plusieurs vitesses selon les ethnies et donc d’appliquer géographiquement une discrimination raciale.
Après l’indépendance, en 1992, le Damaraland fut incorporé pour sa partie nord dans la région Erongo, et pour sa partie sud dans l’Erongo.
Un vilain nom pour une merveille!
Nous commençons la découverte de cette vaste région par le Spitzkoppe. Il porte un nom peu gracieux, qui n’augure en rien de l’émerveillement qu’il suscite. C’est donc un « inselberg », une montagne-île. Le plateau par lequel nous y accédons s’étale à 1000 mètres d’altitude, tandis que le sommet de granit du Spitzkoppe gravite à 1728 mètres. Les Namibiens le surnomment le « Matterhorn » (le Cervin). Je vous rassure, « ils ne se prennent pas la grosse tête », ils sont conscients de l’altitude du célèbre sommet alpin (4478m), mais ils lui trouvent un air de ressemblance avec leur « inselberg » local.
En fait le Spitzkoppe est constitué de deux montagnes séparées. Le pic de 1728 mètres est flanqué d’un massif qui culmine à 1584 mètres. Plus à l’ouest, les montagnes Pontok offrent de merveilleux panoramas au coucher du soleil.
Le Spitz reste un grand défi pour les « montagnards ». La première ascension par l’ouest fut tentée en 1946. Aujourd’hui, on compte près de 600 cordées qui ont réussi à atteindre le sommet par la façade ouest, ce qui représente, en moyenne, 8 groupes de grimpeurs par an. Ce faible chiffre est aussi dû au fait que l’ascension ne peut être réalisée que durant les mois d’hiver, en été la chaleur insoutenable la rend impossible.
En outre, le Spitz est un véritable creuset archéologique. Des centaines de peintures rupestres y ont été découvertes. Le site appelé « Bushmen’s Paradise » (le paradis des Sans) est le plus important de la région. Malheureusement certaines peintures ont été « pillées ». Les visiteurs peu soucieux de préserver le patrimoine ont notamment dérobé un bout de roche où était représenté le serpent, symbole de haute importance dans la culture ancestrale, car il indiquait les points d’eau. On y trouve aussi, pas mal de représentations de rhinocéros. Ce qui signifie que la région en comptait beaucoup autrefois. Aujourd’hui, ils ont complètement disparu des alentours du Spitz.

Les peintures rupestres servaient à informer les autres tribus. Le serpent indiquait où se trouvait le point d’eau le plus proche. Les Sans indiquaient en les représentant, ce qu’il y avait comme gibier dans les alentours. Les personnages peints renseignaient du nombre de personnes qui constituaient la tribu, et même de leur âge, leur sexe et éventuel décès. Des représentations picturales qui servaient de gazette locale et communiquaient au suivants de précieux renseignements.
Si c’était à refaire !
Nous avons regretté de n’y rester qu’une seule nuit. Nous avions suivi les conseils d’autres voyageurs qui mentionnaient que le Spitzkoppe était beau au coucher du soleil, mais qu’il n’y avait pas grand intérêt à prolonger l’escale. En réalité, les possibilités de randonnée nous ont alléchées. Certains chemins sont praticables par des débutants, tandis que d’autres permettent aux plus aguerris et aux mieux équipés l’ascension du pic. Certes, c’est rocailleux, et parfois mal aisé de progresser. Mais les panoramas sur la hamada environnante, et les formations rocheuses valent une escale plus longue. L’aire de camping est spartiate (pas d’eau, pas d’électricité), mais nous étions équipés pour vivre pleinement en bivouacs quelques jours. Cette impression de « nulle part », de « on débranche tout » … et de « on vit au coeur de la Nature » donne des ailes à LA liberté!

Se glisser entre les roches pour découvrir des sites préhistoriques, randonner dans une Nature solitaire. Le Spitz mérite au moins deux jours de bivouac.
La suite de l’escale en photos
(N’hésitez pas à cliquer sur les photos du texte et de l’album pour les agrandir)

Sylvia, une femme damara adorable. Sa fille s’appelle Nathalie, du coup elle m’adopte comme amie et nous échangeons des moments chaleureux. Une très belle rencontre, comme seul le voyage peut offrir où en très peu de temps, tout passe, même l’affection. A notre départ, elle ne se sent pas rassurée lorsqu’elle apprend que nous remontons vers le nord. Elle nous donne quelques consignes que nous suivrons et qui étaient avisées au regard de certaines choses vécues plus tard …

Sylvia vend des cristaux. La région en regorge : quartz, améthystes, dioptases, petersite, apatite barrit… des noms que Sylvia maîtrise pour chacune de ses pierres, aux vertus supposées thérapeutiques

La petite Messypop, trop mignonne. Elle nous sourie, et nous attire à sa case. Nous repartirons en laissant à la famille des vivres (fruits et aliments de base) ainsi que des vêtements. Nous avons passé avec eux, des moments inoubliables

Arrivée au bivouac du Spitzkoppe. L’aire de camping est si vaste, nous prenons le temps de choisir l’endroit où nous passerons la nuit.

Le granit est une roche relativement tendre qui se laisse sculpté par les éléments : changements de température et vents qui opèrent tel un sablage.

En anglais : Cape glossy starling (Lamprotornis nitens) Choucador à épaulettes rouges, en français. Un petit débrouillard qui ne craint pas de nous dévisager pendant le repas, et de voler quelques miettes

Le choucador est suivi de près par un Xerus inauris, écureuil du cap. Il se comporte tel un suricate, dressé sur ses pattes arrière, il observe les alentours : nourriture et prédateurs.

Ils sont malins ! Je ne vois pas celui qui est dessous, mais un écureuil plus loin qui vient de me piquer quelques bouts de pain… En fait il y a plus de voleurs que je ne le pense !

A l’abri du soleil, du vent, les peintures des Sans témoignent de leur activité, et de leur présence depuis plus de 25000 ans. Et à chaque découverte on repousse leur ancienneté, certains annoncent leur arrivée il y a 40 000, voire 55 000 ans

Improbable rencontre… Un arbre en devenir s’enracine dans le granit. Roche tendre, les racines parviennent à la percer, c’est également ainsi que les arbres se forgent un accès aux nappes souterraines sur plusieurs dizaines de mètres.

La flore opportuniste profite de toute faille pour s’y enraciner et pousser à l’abri des éléments, tout en favorisant les structures susceptibles de conserver l’eau plus longtemps

Il existe 3 sortes de zèbres dont deux sont représentées en Namibie. Ici, le zèbre de Burchell’s, ou zèbre des plaines. On les reconnaît par leur museau qui porte une tache noire marquée, et les zébrures qui alternent le noir et des teintes marron clair dans les espaces blancs.

On ne se bouscule pas au bivouac de Spitzkoppe… Il y a tant d’espace qu’il en devient difficile de choisir son « spot » du jour !

Damans du cap dérangé dans leur incommensurable tranquillité e Daman du Cap (Procavia capensis) aussi appelé Daman des rochers est une espèce de mammifère de l’ordre des Hyracoidea. Superficiellement, il ressemble à une marmotte ou un gros cochon d’Inde avec ses oreilles et sa queue courte. Il est appelé dassie en Afrique du Sud
Quelques versions panoramiques
Pour profiter pleinement de ces clichés, agrandissez-les
La vidéo de l’escale : Le Spitzkoppe
A bientôt,
Pour la suite de notre voyage en Afrique
Nat & Dom
Texte et photos Nathalie Cathala.
Auteurs des vidéos : Dominique et Nathalie Cathala, montages Dominique Cathala
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Quel beau voyage au milieu de nul part …avec ces superbes couleurs , bien du mal à croire qu’ un lieu pareil existe encore …et si et bien d autres ..que la Nature est Belle, elle nous enchante chaque jour , le long de notre vie ..encore et encore …je préfère voir ce chemin avec ces yeux étonnes et encore pour longtemps j espère. .Merci à vous ..de partager ces si beaux moments ..
Merci Colette, très émue de te lire, car c’est exactement mon ressenti! Oui, il existe encore beaucoup d’endroit comme ceux-là, même si l’homme colonise la terre, et qu’il est présent partout… Il faut être conscient de notre trésor, comme tu l’es, pour préserver tout ce qui reste à protéger !