Au programme : De Sesreim à Walvis, du désert de dunes à l’océan en passant par les canyons minéraux de la Pass de Kuiseb. En route vers un autre monde, avec un petit détour par le « Bagdad café » namibien.
Bonjour,
Nous quittons « Mad Max 12 », la station-service de Sessreim pour continuer notre remontée vers le Nord. Nous longeons les montagnes du Naukluft. La piste est beaucoup plus fréquentée que toutes celles empruntées jusqu’à présent. Nous craignons à chaque rencontre qu’une pierre envoyée intempestivement par une voiture ne brise notre pare-brise déjà moucheté d’impacts.
Solitaitre
Soudain quelques vieilles carcasses de voitures rouillées et un regroupement de touristes animent la piste. L’endroit est surnommé le « Bagdad Café » namibien. Ce n’est pas une ville, ni même un village, mais une ancienne ferme du désert qui s’est instituée « passage obligé » pour les visiteurs de la région. Ainsi ont poussé autour d’un coeur initial : une épicerie aux allures de « General Store » de la route 66 américaine, une station essence, un lodge, et une boulangerie. C’est sans doute cette dernière qui a amorcé le tournant décisif de cet endroit afin qu’il perde son cachet « solitaire ». Il y a plus de 20 ans, Percy Cross McGregor, surnommé Moose McGregor s’est mis en tête de faire chaque jour en plein désert des strudels aux pommes. Oui, oui… des pommes! Ne me demandez pas d’où il faisait venir jusqu’ici ces bons fruits juteux, mais pas de Namibie. Un tour de force, salué par tous les gourmands qui passent par ici. L’initiateur du Strudel est décédé à 56 ans en 2014, mais son gâteau aux origines autrichiennes lui survit et Solitaire devient une usine à touristes bien rodée.
Kuiseb
Après Solitaire, nous piquons vers l’océan pour traverser le Namib d’est en ouest. Le paysage change brutalement ! La piste sillonne un plateau rocheux crevassé de rivières asséchées. Le socle primaire a perdu son épais manteau de sable et met en évidence tous les épisodes géologiques dont je vous ai parlé dans les trois précédents blogs. Nos pauses se transforment en réels voyages dans le temps, nous observons les strates de roches qui témoignent de la déchirure entre les continents et des mouvements épirogéniques qui ont suivi.
À l’est de la piste s’étire le Grand Escarpement. C’est une sorte d’énorme bouclier qui défend un plateau gigantesque dont la plus grande partie se situe au-dessus de 900 mètres d’altitude. Ce plateau règne sur toutes les terres intérieures de l’Afrique australe depuis l’Angola, en passant par la Namibie, faisant tout le tour de l’Afrique du Sud et remontant parallèlement à la côte est vers la Zambie. Dans un premier temps, ce plateau s’est soulevé, par la suite l’érosion a façonné les falaises escarpées. Lors de notre arrivée en Namibie, nous cheminions sur ce plateau, nous baladant dans le Kalahari, le Karoo, et bien d’autres régions au passé géologique intéressant.
Depuis que nous sommes dans le Namib, nous sommes à l’ouest du Grand Escarpement, en contre-bas et nous suivons les lits de rivières éphémères qui vont y chercher leur source.
Pass Kuiseb rendez-vous dans un autre monde!
La Pass de Kuiseb marque véritablement la frontière entre deux paysages du Namib. Au Sud, les belles dunes lumineuses que nous venons de quitter, au Nord, un paysage minéral, lugubre, sévère qui s’étale vers l’ouest. En d’autres temps, le fleuve Kuiseb subissait des débordements qui lessivaient le sable et le portaient jusqu’à l’océan formant un grand delta à Walvis qui faisait barrage aux déplacement vers le nord du sable de la côte. C’est ainsi que se forma la baie abritée de Walvis. Mais maintenant que la capitale capte l’eau par un barrage près de Windhoek le « courant nettoyeur » ne se fait plus. Le fleuve a coulé jusqu’à l’océan en 2000, alors qu’il ne l’avait plus fait depuis 30 ans.
La piste épouse les méandres tortueux du fleuve. Alors que l’eau est l’un des facteurs responsables du lessivage du sable, je n’ai jamais vu paysage plus aride que celui-là. Nous évoluons entre gris clair et gris foncé, nous avons perdu la belle polychromie si joyeuse des dunes qui nous a accompagnées depuis le Kalahari et puis dans le Namib. Nous nous enfonçons, tels des pénitents, dans l’austérité.
La route est longue, sinueuse, mauvaise. Chaque soubresaut de la voiture entame notre énergie. Au bout de la piste, nous grimpons sur la route en bitume qui nous mène au bord de l’océan à Walvis. Si la surface est agréable, le décor est d’un ennui ! Le brouillard gagne et la température diminue au rythme où nous descendons vers l’océan. Nous perdons en deux heures 34 degrés et passons de 46° à 12°.
Quels contrastes !
Il fait frais, le ciel est uniformément gris, tout est enchâssé dans un brouillard humide. L’océan qui borde Walvis nous paraît fermé et nous offre moins d’horizons que le désert.
Des jardins arrosés ?
Walvis est une ville portuaire, point d’entrée et de sortie des marchandises. Walvis est le seul port en eau profonde de la Namibie. Sur l’horizon, des navires de toutes tailles attendent de décharger toutes les denrées dont manque la Namibie, très dépendante de l’Afrique du Sud. D’autres navires emportent au-delà des frontières le produit de la pêche (Colin, merlu, sardines, langoustes…) ainsi que celui de l’industrie minière : diamant, cuivre, plomb, zinc, uranium. Ainsi que le gaz issu du gisement de Koudou.
Au-delà de son cachet de vieux loup de mer, le front de mer de Walvis est résidentiel. Les abords des maisons sont entourés de jardins propres, verts, fleuris. Mais d’où vient l’eau pour nourrir ce fleurissement? Pas du brouillard qui n’apporte que 40 mm par an! Il existe une usine de dessalement, mise en place par AREVA (Orano depuis 2018) afin d’exploiter la mine d’uranium de Trekkopje. Mais après la catastrophe de Fukushima, et la baisse du prix du minerai, le site a été mis « sous cocon ». Ainsi, la multinationale française du secteur de l’énergie a proposé son usine de dessalement à la vente. Mais le gouvernement a estimé que le prix demandé pour le site était trop élevé. Les négociations se poursuivent.
Aujourd’hui, comme bien des villes de Namibie, Walvis est alimentée par des eaux de recyclage afin de limiter au maximum le captage par forage dont la Namibie a trop abusé, mettant en péril ses ressources en eau.
Suite en Photos
La Vidéo de l’étape :
Embarquez à bord du 4*4
A bientôt,
Poursuivons ensemble l’Aventure en Afrique
Nat & Dom
Texte et photos Nathalie Cathala.
Auteurs des vidéos : Dominique et Nathalie Cathala, montages Dominique Cathala
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Sources bibliographiques
https://fr.wikipedia.org/wiki/Grand_Escarpement_africain
L’évolution morphologique du grand escarpement de l’Afrique australe à propos d’un ouvrage récent : Obst et Kayser, Die Grosse Randstufe auf der Ostseite Südafrikas und ihr Vorland. (Geographische Gesellschaft zu Hannover)
Revue géographique des Pyrénées et du Sud-Ouest. Sud-Ouest Européen Année 1954 25-3 pp. 266-270
Wikipedia
http://www.panapress.com/Projet-de-dessalement-de-l-eau-de-mer-en-Namibie–13-587962-17-lang2-index.html
https://www.futura-sciences.com/planete/dossiers/voyage-cent-jours-namibie-voyage-geologique-1761/page/14/
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